Rechercher dans ce blog

lundi 16 mai 2022

La Cour de cassation valide le barème prud’hommes...

... et c'est un coup dur pour les droits des salariés !

Préalable : cet article est une reprise d'un communiqué Cfdt, complété de nos propres commentaires

Par deux arrêts rendus le 11 mai 2022, la Cour de cassation a validé le barème prud’hommes que la CFDT a toujours vivement combattu. 


Rappel du contexte 

À l’occasion des ordonnances travail de septembre 2017, un barème d’indemnisation en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse a été introduit dans notre droit via une réécriture de l’article L. 1235-3 du Code du travail. 

Ce barème fixe des dommages-intérêts planchers et des dommages-intérêts plafonds qui varient en fonction du critère de l’ancienneté. 

Par exemple, un salarié qui justifie de 4 années d’ancienneté peut, s’il est licencié sans cause réelle et sérieuse, prétendre à :

  • au moins 3 mois de dommages-intérêts (plancher) 
  • au plus 5 mois de dommages-intérêts (plafond).

[ NB : Avant la réforme, un licenciement illicite était automatiquement sanctionné d'une indemnité minimale équivalente à 6 mois de salaire. Il s'agit d'une vieille revendication patronale qui s'indigne de la "loterie" que constituerait à ses yeux les procédures prud'hommales]

Assez rapidement, des décisions de conseils de prud’hommes, puis de cours d’appel, ont conclu à la non-conformité du barème avec l’article 10 de la convention OIT n°158 et l’article 24 de la charte sociale européenne. Chacun de ces 2 textes précise en effet que, faute pour le salarié abusivement licencié d’être réintégré dans l’entreprise, celui-ci doit pouvoir prétendre à une « indemnité adéquate » ou à une « autre réparation appropriée ».


Le contenu des arrêts de la Cour de cassation

Par 2 arrêts du 11 mai 2022, la Cour de cassation a donc jugé que le barème prud’hommes est compatible avec l’article 10 de la Convention n°158 de l’OIT. 

Selon elle, les dispositions du Code du travail « qui octroient, en cas de licenciement injustifié, une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux variant en fonction du montant du salaire mensuel et de l’ancienneté du salarié et qui prévoient que dans les cas de licenciements nuls (...) le barème ainsi institué n’est pas applicable, permettent raisonnablement l’indemnisation de la perte injustifiée de l’emploi. ».

Elle considère par ailleurs que le fait que l'employeur soit tenu, en cas de licenciement injustifié, de rembourser les allocations chômage est suffisamment dissuasif pour éviter ces licenciements abusifs.


Rappel de la position de la CFDT quant au barème

La CFDT a toujours clairement exprimé sa ferme opposition à l’introduction du barème dans notre Code du travail.

En effet, pour la CFDT, le barème prud’hommes - qui est de nature à sécuriser les seuls employeurs - doit être combattu car il prive le salarié abusivement licencié, c’est-à-dire en violation de la loi qui impose l’existence d’une cause réelle et sérieuse de licenciement, d’une réparation adéquate de son préjudice.

De plus, selon la CFDT, le barème peut avoir pour conséquence, en particulier pour les salariés qui ont une faible ancienneté, une renonciation à agir en justice lorsque l’indemnisation du préjudice « prévisible » est trop faible. Ce barème affaiblissant par ailleurs fortement le caractère dissuasif du coût de la violation de loi.

Enfin, ce barème porte atteinte au rôle du juge qui se voit ainsi fortement réduit dans son pouvoir d’appréciation du préjudice, pouvoir pourtant central.


Des décisions décevantes

Pour la CFDT, les arrêts rendus par la Cour de cassation sont particulièrement décevants puisqu’ils considèrent que les barèmes sont conformes à l’article 10 de la convention n°158 de l’OIT, et rejettent toute possibilité pour les juges de se livrer à un contrôle in concreto de la conventionnalité de ces barèmes.

La CFDT est particulièrement inquiète, car il est ici question de la sanction de la violation de la loi par l’employeur qui licencie sans motif. Cette sanction, lorsqu’elle est prévisible et insuffisamment dissuasive, ne produit plus les conséquences qu’elle devrait produire, à savoir protéger efficacement et effectivement les salariés contre un licenciement abusif. L’indemnisation espérée, lorsqu’elle est trop faible, conduit également le salarié à renoncer à agir en justice pour contester son licenciement qu’il considère pourtant abusif.

Pour la CFDT, c’est désormais la loi qui doit évoluer afin qu’a minima, à défaut d’être supprimés, les barèmes soient revus à la hausse de sorte que les préjudices subis par les salariés soient, en toute hypothèse, indemnisés de manière adéquate.


Sachant qu'il y a chaque année de l'ordre d'une cinquantaine de licenciements chez Modis, nous sommes particulièrement inquiets des conséquences de cette décision. En effet, au vu de la faible ancienneté de nos salariés, ils seront particulièrement impacté par les plafonds d'indemnisation mis en place. 


Pour aller plus loin :

3 commentaires:

  1. Il ne faut pas hésiter à attaquer aux prud’hommes son employeur si le licenciement est abusif/injustifié.
    Surtout si on accumule des preuves contre l'employeur.
    Celui-ci vous fera peur pour vous dissuader mais reviendra vers vous s'il voit que vous le trainez en justice, puis ce sera une phase de négociation dont le montant sera supérieur aux indemnités prudh'hommales car l'employeur évitera à tout prix une condamnation.

    RépondreSupprimer
  2. MODIS = Adecco = intérim, donc le contrat, même le CDI, est de court duré (en réalité, délivré pour la 1 ère mission). La 2ème mission arrive rarement, car ce n'est plus dans la logique de MODIS. Encore une fois, MODIS c'est intérim, déguisé en CDI, pour pouvoir attirer la manœuvre pas chère. Le reste c'est de la publicité.

    RépondreSupprimer
  3. Effectivement, Intérim en cdi non renouvelable. Inter contrat trop cher et pas de suivi personnalisé de Modis quant aux attentes des salariés.
    Après avoir eu une lettre de recommandation du client, j'ai prouvé le licenciement aurait été considéré qu'abusif, sinon 2 mois de salaires nets mini en rupture conventionnelle.
    Effectivement avec le bareme mini de 3 mois, j'ai négocié 2,3 mois de salaire net d'impôts et ce juste avant l'anniversaire des 4 ans d'ancienneté, dont les montants évoluent après 3 ans.
    Ceci am'a évité d'aller aux prud'hommes sachant que le delai d'attente à Nanterre des prud'hommes est de 3 ans minimum. Tout est fait pour décourager les salariés pour intenter une action en justice.
    Mon conseil a été de percevoir une indemnité supérieure à l'indemnité légale de licenciement tout en atteignant entre deux et 3 mois d'indemnités sans procédure longue et coûteuse.
    Courage!m Car la vache à lait est maigre.

    RépondreSupprimer