0 + 0 + 0 + 0 + 0 + 0 + 0 = ... 7 ans de participation chez euro engineering
Un résultat qui explique pourquoi moins de 1 salarié sur 10 est en mesure d’acquiescer à l'affirmation selon laquelle "le partage des richesses dans l'entreprise me parait équitable" (source: enquête Great Place To Work 2017)!
Ainsi, alors que le gouvernement prépare un Plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE) qui comprend un volet lié au partage de la valeur des entreprises, nous comptons apporter notre contribution en jetant un coup d’œil dans le rétro et en répondant à une question que beaucoup d'ex-euro engineering se posent:
Pourquoi la participation est-elle toujours nulle ?
Comment cela est-il possible, alors que notre société a tout de même connu quelques bonnes années depuis que la participation est en place ?
On vous explique tout dans cet article.
Rappel de l'accord en vigueur
Depuis juin 2010, un accord d’entreprise a mis en place les modalités de versement d’une participation aux bénéfices pour les salariés d’Ajilon Engineering, ensuite devenu euro engineering.
Cet accord implique de redistribuer sous forme de participation une enveloppe calculée chaque année selon la formule légale suivante :
RSP = ½ (B – 5% CP) x MS / VA
Avec :
- RSP : Réserve Spéciale de Participation(la cagnotte à distribuer aux salariés)
- B : Bénéfice fiscal
- CP : Capitaux Propres
- MS : Masse salariale
- VA : Valeur Ajoutée
Comme dans toute multiplication, il importe pour que le résultat ne soit pas nul qu’aucun des 2 termes ne soit égal à 0.
Si cela ne fait aucun doute du rapport Masse Salariale / Valeur Ajouté (en vert), il n’en est pas de même concernant le premier terme (en bleu).
Pour faire simple, pour qu’il y ait déclenchement de participation, il faut que le bénéfice fiscal soit non seulement positif, mais aussi supérieur à 5% des capitaux propres.
Niveau de bénéfice permettant de déclencher la participation
Ces dernières années, la Direction a choisi de renforcer sensiblement nos capitaux propres, afin notamment de donner davantage de confiance à nos clients quant à la viabilité financière de notre société. Ainsi, pour que la participation se déclenche, il faut que le bénéfice réalisé sur l’année soit au minimum de 700 k€ depuis 2014 (5% de nos capitaux propres)
A première vue, ces sommes ne paraissent pas inatteignable (cela correspond à environ 1000 € de bénéfice généré par salarié) et on se demande toujours se qui cloche.
Calcul du bénéfice net
Le bénéfice (ou résultat) varie sensiblement d’une année à l’autre, comme l'illustre le graphique suivant:
On comprend immédiatement pourquoi en 2012, 2015 et 2016 notre participation était nulle, compte tenu de la faiblesse des résultats enregistrés. Par contre, la situation était nettement meilleure en 2013 et 2014, et l'on se demande pourquoi ils n'ont pas permis de déclencher de la participation.
Hors, il faut savoir que ce n'est pas le bénéfice net qui est pris en compte dans le calcul de participation, mais le bénéfice fiscal. Et c'est là qu'interviennent 2 effets qui s’additionnent pour réduire à néant toute possibilité de toucher un jour de la participation.
L'impact des Crédits d’Impôts sur le calcul du bénéfice fiscal
Notre société, comme toutes celles de son secteur, bénéficie massivement de deux types de crédit d’impôts :- Le Crédit d’Impôt Recherche (CIR)
- Le Crédit d’Impôt pour la Compétitivité et l’Emploi (CICE), mis en place en 2013
Ces crédits d’impôts viennent très fortement impacter à la baisse le calcul du bénéfice fiscal, et ainsi notre société apparait pour le fisc comme déficitaire quasiment chaque année, comme l'illustre le graphique suivant:
Ceci à l'exception de 2014, ou une activité exceptionnelle a permis d'atteindre des résultats suffisamment élevés pour que même après prise en compte des crédits d’impôts, le bénéfice fiscal soit largement positif!
De quoi peut-être enfin verser de la participation pensez-vous? Et bien non, car c'est là qu'intervient le dernier dispositif...
Le boulet des déficits reportables
La loi prévoit que les entreprises réalisant un déficit peuvent le déduire de leur future déclaration de résultat, en le reportant sur les bénéfices suivants. Hors il se trouve que notre société a depuis une dizaine d’année accumulé des déficits en quantité, comme le montre le graphique suivant :Au final, se sont plus d'une dizaine de millions d'euro de déficits fiscaux qui se sont accumulés au fil des années.
En 2014, notre société a donc déduit de son résultat fiscal positif une partie de ces déficits reportables, dans la limite (prévue par la loi) de :
- 100% jusqu’à 1 M€,
- puis 50% au-delà
Et malheureusement, une fois ce dernier retraitement effectué, le bénéfice fiscal servant de base au calcul de la participation devient inférieur à 5% des capitaux propres, c’est ainsi que même lors de cette année exceptionnelle, les salariés n’ont pas touchés de participation.
Commentaire personnel : le fait de fixer un seuil en dur (à 1M€) permettant la déduction de 100% du résultat est une vraie plaie pour les entreprise de taille petite à moyenne (type euro engineering), dont le résultat fiscal dépasse difficilement 1M€. Un seuil dépendant de la taille de l'entreprise serait bien plus pertinent.
Conclusion
Les travers que nous décrivons dans cet article sont communs à de nombreuses autres sociétés, et le législateur s'interroge depuis longtemps sur l’opportunité de moderniser la formule légale du calcul de la participation (qui n'a pas été revue depuis sa mise en place sous De Gaulle, en 1959).Ainsi, un rapport de l'IGF et l'IGAS conclu en 2013 que "la formule de réserve de participation est perçue comme trop complexe, inadaptée, obselète (...)".
En 2014, le ministre de l'emploi missionne le Conseil Supérieur de la Participation (oui, ça existe!) pour notamment évaluer l'impact de la substitution du bénéfice comptable au bénéfice fiscal dans la formule. Une piste de réflexion à laquelle nous ne pouvons que souscrire!
Enfin, plus proche de nous, Emmanuel Macron déclarait en octobre dernier :
Quand une entreprise a des difficultés, il faut que par le dialogue social on puisse ajuster les choses. Mais quand ça va mieux, je veux aussi que les salariés puissent avoir leur part de réussite. Donc je souhaite qu’on puisse revisiter cette belle invention gaulliste de l’intéressement et de la participation. Je veux qu’en 2018 on puisse avoir un vrai débat sur ce point.Ce débat s'ouvre aujourd'hui via une consultation en ligne ouverte à l'ensemble des citoyens.
Nous y avons apporté notre contribution, et vous pouvez la soutenir ou la commenter en cliquant sur ce lien.
Merci pour cet exposé clair et tout à fait compréhensible pour une néophyte comme moi.
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